La Société des Anti-Politiques d'Aix

Par Jean-Baptiste Budjeia, Université de Lille (UMR 8529-IRHiS).

La Société des Anti-Politiques d'Aix

Les Antipolitiques étaient un club politique au recrutement très populaire, dans une ville « aristocratique ». Aix, capitale de l’ancienne province de Provence, fut près de trois ans capitale du jeune département des Bouches-du-Rhône. Parmi ses trois députés aux états généraux du Royaume, elle avait envoyé son archevêque, Boisgelin, et le tonitruant Mirabeau. Mais cette « façade aristocratique » ne doit pas laisser oublier qu’il existait dans cette ville un mouvement populaire fortement engagé dans le processus révolutionnaire, mouvement porté par des artisans et des cultivateurs qui s’établirent en cercle le 1er novembre 1790 et se choisirent un nom, les Antipolitiques, qui ne peut laisser indifférent. Être Antipolitiques ne signifiait pas être contre la politique, mais contre les hommes politiques, du moins contre les pratiques qui leur étaient associées, ces hommes étant perçus comme des intrigants gouvernant pour leurs intérêts propres contre la Chose publique et le « bonheur commun » ; on opposait, en somme, les intérêts particuliers à la vertu, nous y reviendrons. Des artisans et des cultivateurs qui doubleraient sur sa gauche la Société des Amis de la Constitution d’Aix, tenue par les robins de la ville, et rivaliseraient de prestige et de ferveur patriotique avec les puissants Jacobins marseillais.

Les Antipolitiques furent sinon fondés, du moins rassemblés par un « curé rouge », l’abbé Rive, que Michel Vovelle désignait comme « le Marat aixois », personnalité volcanique animée par une ferveur anticléricale ! Ce personnage singulier, homme des Lumières à la solide réputation d’érudit dans toute l’Europe alors, serait, même après sa mort en octobre 1791 (1), « l’inspirateur (2) » et « le guide (3) » des Antipolitiques – quoique des individus de la société aient voulu sans détacher un moment. Sa pensée politique radicale était l’illustration de la Révolution populaire, démocratique et sociale en Provence, au service d’un projet d’envergure nationale. Ainsi, l’abbé Rive écrivait aux Commissaires du Roi, en janvier 1791 : « Sommes-nous libres en France, ou la liberté dont on nous y flatte, n’est-elle qu’un leurre ? C’est ce qu’il faut nécessairement expliquer au Peuple. Si nous y sommes véritablement libres, nous y sommes égaux, parce que nous y sommes tous hommes, & qu’il n’y a point d’homme qui y soit plus homme qu’un autre. Il ne nous y faut donc que de vrais démagogues, & de justes démophiles (4). » Nous relèverons ici la portée méliorative du terme « démagogue » et la revendication d’un mot à la puissance symbolique très marquée, « démophile », qui semblaient prendre en contre-pieds les accusations dont les « modérés » pouvaient frapper, sur la période, les « patriotes prononcés » ; pensons par exemple à « anarchistes » ou « exaltés ». Mais retenons, au-delà des effets de rhétorique, la conviction de l’abbé établissant l’égalité comme constitutive de la liberté et réciproquement, au fond, exprimant la conviction que la liberté était un lien social. Ce serait là la boussole politique des artisans et des cultivateurs d’Aix et de sa campagne environnante – et peut-être même de leur important réseau d’affiliation – établis en cercle antipolitiques – jusqu’à leur dissolution définitive à l’été 1795 – , et dont ils diraient dès leur installation le 1er novembre 1790 qu’ils étaient « des hommes vrais, justes et utiles à la Patrie (5)».

Pour finir cette entrée en matière, définissons ce qui semblait être l’essence du combat des Antipolitiques ; tout d’abord la certitude que de modestes conditions sociales étaient intrinsèquement la qualité des humbles – et même si le noyau du club, constitué notamment de métayers, était citoyens actifs (6) –, ce qui les conduisit à tenir des positions très démocratiques et très sociales – je ne développerai pas ce soir ces points –, voire un discours « classiste » – sur lequel je m’attarderai. Ensuite, une lutte permanente contre les « aristocrates », et le terme n’est évidemment pas à entendre dans sa seule acception sociologique. Enfin, ils furent dans le bassin aixois, voire dans une bonne partie de la Provence, le fer de lance contre le fanatisme religieux. Au fond, les Antipolitiques d’Aix apparaissent, à l’instar des Cordeliers à Paris, comme, je cite Albert Mathiez, « (…) un groupement d’action et de combat (7). »

De façon à respecter le temps imparti et l’espace consacré à l’échange, je me centrerai sur ces trois éléments – la sociologie, la terreur des « aristocrates », le fer de lance contre le fanatisme – et ces trois seulement, mais beaucoup d’autres sont constitutifs de la vie de la société – la place des femmes, des politiques sociales ambitieuses, les rivalités avec Marseille, etc. – et pour une période courant de l’automne 1790 au printemps 1794.

I. Une sociologie populaire

Les hommes de loi d’Aix s’étaient réunis au sein de leur Société des Amis de la Constitution le 9 mai 1790 (8), dûment affiliée à la société de Marseille et par son intermédiaire aux Jacobins de Paris. L’abbé Rive réunit autour de lui à l’automne des artisans et des cultivateurs sur fond d’agitation contre-révolutionnaire dans l’affaire Pascalis, un avocat « aristocrate » contre lequel la municipalité modérée, tenue par un autre avocat, Jean Espariat, ne prit aucune mesure sérieuse. C’est donc un sursaut patriotique qui poussa à l’établissement du cercle antipolitique, un sursaut patriotique intrinsèquement, inéluctablement lié à une forte conscience sociale et, osons l’expression, une forte « conscience de classe ».

Ainsi, le 1er novembre 1790, alors que l’on procédait à l’établissement du Cercle des Antipolitiques d’Aix, Silvacane, son premier secrétaire (9), instituait l’opposition de fait, selon lui, qui existait entre les notables de la ville, y compris des administrations révolutionnaires, et « le Peuple », au sens plébéien du terme. « Prouvez à ces hommes superbes et présomptueux, naguère vos tyrans, qui n’osaient vous qualifier d’hommes, qui (?) encore à devenir vos égaux, prouvez-leur que vous êtes susceptibles des plus grands projets, des plus grandes vertus, incapables des crimes dont ils sont plus d’une fois souillés, compagnons ordinaires de l’opulence, du faste, et de l’oisiveté. Reprochez-leur leur injustice à votre égard par l’exemple d’une conduite irrépréhensible, d’une sagesse, d’une modération, et d’une fermeté à toute épreuve (10). »

L’aristocrate, le bourgeois, le notable, investi dans les affaires de la Cité, bref, l’homme politique, serait presque par essence corrompu car corruptible, un intrigant soudainement converti aux principes nouveaux, principes qu’il méprisait encore la veille de la Révolution, et c’est en cela que le « patriote prononcé » issu de « la plèbe », celui qui gagnait son pain à la force de ses mains et à la sueur de son front, serait plus naturellement enclin à la vertu, au désintéressement, à œuvrer pour le « bonheur commun » et donc, à mieux combattre pour les droits naturels qui devaient désormais régir la société ; ici nous noterons une connivence évidente avec la philosophie politique de Robespierre. C’est en cela que le « patriote prononcé » de la ville d’Aix, issu notamment de la terre qu’il cultivait, ne pouvait qu’être antipolitique (11).

Au fil de l’histoire de la société, ce nom Antipolitiques poserait plusieurs fois problème. À l’établissement du club, Silvacane l’inscrivait dans une forme de « lutte des classes » ou, si nous préférons une expression moins connotée dans le temps, dans une confrontation d’intérêts du peuple et de la bourgeoisie – voilà donc qu’un protagoniste des évènements adopte un positionnement aux antipodes de celui couramment admis relatif à l’alliance nécessaire du peuple et de la bourgeoisie pour faire tomber l’Ancien Régime et ériger le nouveau. Mais au-delà de la simple lecture, posture « classiste », Silvacane traduit une inquiétude : celle de la récupération, de la confiscation de la Révolution par l’aristocratie libérale et la bourgeoisie d’affaires ; en somme, les Antipolitiques craignaient que l’on substituât à « l’aristocratie des nobles » « l’aristocratie des riches » ; ici, ils semblent encore faire écho à Robespierre, ou à Marat. D’un côté, il y aurait les « (…) actifs cultivateurs, industrieux artistes (12) » – comprendre les artisans –, « citoyens précieux » car « (…) guidés par la Nature, par leurs (vos) consciences, par l’amour du bien (13)», puis l’expression est lâchée : « Eh, quelle classe en est plus digne (14)! » ; de l’autre, ces « vils et rampants égoïstes captateurs de suffrages qui ne motionnent que se procurer des places qu’ils ravissent au vrai mérite, les orgueilleux caussidiques qui, appuyés d’un langage entortillé, de mots barbares et inintelligibles séduisent les esprits faibles, et les dirigent vers leur but (15) ». L’éloquence, voire la grandiloquence, dénoncée comme paravent de l’intrigue et des « lois et décrets anticonstitutionnels ». L’éloquence ne serait cependant pas rejetée pour jamais aux Antipolitiques. Ainsi, les conditions modestes revendiquées comme qualités politiques, comme limon de la vertu, serait la garantie de l’érection non pas d’une « République des indigents », mais d’une « République pour les indigents », nécessaire si l’on voulait éradiquer la misère. Il convient par ailleurs de noter que ce discours « classiste » ne visait pas les seules autorités constituées modérées – nous y reviendrons – et potentiellement la Société des Amis de la Constitution d’Aix, mais il était également porté, frappé, à l’adresse de Louis XVI en personne – et spécifiquement face au péril contre-révolutionnaire !

Ainsi, apportant leur soutien à l’adresse des Jacobins de Caen à l’Assemblée Nationale en décembre 1791, les Antipolitiques d’Aix écrivaient le 1er janvier 1792 au chef du pouvoir exécutif : « Libres sous la protection des Lois, nous Agriculteurs, sans les sueurs desquels il n’existerait ni industrie, ni commerce, ni société, et par conséquent ni princes & rois, nous adhérons de tout notre cœur & de toute notre âme, à l’adresse que tes concitoyens de Caen t’ont écrite. Nous t’invitons, nous te conjurons, s’il le faut, à n’écouter que ta raison & la voix de ta conscience, éloigne pour jamais d’auprès de toi, ces hommes dégradés par les sentiments les plus avilis, & qui achetaient, par les bassesses les plus révoltantes, le droit de nous opprimer (16). » Nous retrouvons encore cette opposition structurante du combat politique révolutionnaire pensé avant tout comme une « lutte des classes ». La précarité de leur situation, la fragilité de leur existence, les Antipolitiques la soulignaient également à l’adresse des députés qu’ils exhortaient à soutenir leur « (…) dignité, (…) par l’attitude la plus imposante », « représentants d’un peuple souverain, d’un peuple qui a juré de vivre libre ou de mourir (…) le seul oracle que l’on doive consulter (18) (…) » ; « Que faut-il que nous devenions, nous pauvres Agriculteurs qui sommes entièrement ruinés par la mortalité de nos oliviers (19) ? »

Ces « pauvres agriculteurs », les 100 premiers Antipolitiques, demeuraient tout de même des citoyens actifs, de cette « portion haute » du monde du travail, qui nous rappelle que la petite bourgeoisie, celle qui avait une instruction minimale, conservait la tête des Antipolitiques, à l’instar du schéma cordelier : « Les bourgeois, écrit Mathiez, les gens aisés, gardent cependant sur le club une influence prépondérante. C’était fatal en un temps où ils étaient seuls en possession de l’instruction (20). »

Cette petite bourgeoisie pour partie instruite n’était pas pour autant aisée, et les « têtes de pont » de la société ne doivent pas effacer la dure réalité sociale vécue par nombre de clubistes. Plusieurs éléments permettent d’évaluer les conditions modestes des Antipolitiques. Tout d’abord, la quotité due pour participer aux séances du club – quotité mensuelle sans droits d’entrée préalables. Les sources ne précisent pas le montant de celle-ci dans les premiers mois d’existence des Antipolitiques, mais le 3 avril 1791, elle fut réduite à 3 sols (21) ! La première ré-augmentation relevée ne le fut que pour un mois, dans le but de « (…) pourvoir au paiement du déplacement des Commissaires députés à Marseille (…) », et l’on demandait aux clubistes de s’acquitter alors de 6 sols (22). La seconde demande d’augmentation était proposée par un membre à la fin du printemps 1794, et ce « afin d’augmenter les fonds de la société (23)». Il suggérait « de mettre la côte à 10s ». Ainsi délibérée. À titre de comparaison, arrêtons-nous une fois de plus sur le Club des Cordeliers. Ils « (…) se distinguent des autres clubs patriotes par une physionomie particulière » nous dit Mathiez. Ainsi, il évoque la dimension résolument populaire de la Société des Amis des Droits de l’Homme : « Aux cordeliers poursuit-il, la cotisation ordinaire qui donne droit à la carte de membre actif est d’une livre quatre sols, soit deux sols par mois. C’était un prix abordable aux petites bourses (24). » Si l’on en croit le relevé de Claude Taccetti (25) qui réalisa un mémoire de maîtrise sur les Antipolitiques en 1969, sous la direction de Michel Vovelle, la quotité mensuelle aux Jacobins aixois était de 24 sols ! Mathiez signale pour la société de 89 des droits d’entrée de 100 livres (26).

Aux Antipolitiques d’Aix, non-seulement la quotité mensuelle demandée était peu élevée, mais en plus la société connut régulièrement des difficultés à faire entrer l’argent. Effectivement, les conditions socio-économiques des clubistes ne leur permettaient pas toujours de payer leur dû et cela posa de véritables problèmes aux bureaux successifs, qui prirent ses difficultés à bras-le-corps, oscillant entre mesures répressives et solidarité. Le 25 janvier 1791, déjà, l’assemblée délibéra « que personne n’entrerait sans avoir sa contremarque, excepté dans les séances publiques (27), vu les abus dont elle s’est aperçue. » Le 27 février, constatant que beaucoup de membres étaient en arriéré de plusieurs mois, l’on décida de faire un tableau des noms de tous ceux qui ne paieraient pas (28). De surcroît, la sévérité de la mesure fut appuyée en annonçant que le tableau serait « (…) placardé sur une muraille de la salle, tous les quinzièmes jours de tous les mois (29). » Fut-ce un coup d’épée dans l’eau ? Probablement, car le 28 avril on procéda à un rappel à l’ordre, répétant la mesure et insistant sur la nécessité « (…) que la contribution de chaque mois soit payée avec exactitude (30)(…) ». À la lecture des sources, on a la sensation que chaque rappel à l’ordre est un rappel du précédent, que chaque menace brandie est un aveu de faiblesse du Président ; on atteint un degré paroxystique le 20 mai 1791, étant passé de « nécessaire » à « l’absolue nécessité (31) ». On décide alors de se « décharger » sur le concierge qui, désormais, à la quinzaine du mois, a ordre de ne pas laisser entrer les personnes qui ne pourraient pas présenter un diplôme et une carte signée du Vice-Président, constatant ainsi les paiements (32).

Ce problème de contribution des membres semble inextricable. On paraît même en avoir pris acte et s’en accommoder sous la présidence de Dufresne et l’on assouplit – aveu d’échec ? – la méthode. En effet, le 2 juin 1791, le clubiste Ducros propose une motion qui insuffle une nouvelle stratégie : « La société a délibéré que ceux de ses membres qui viendraient réclamer le secours de l’Assemblée, dans le besoin, eussent au moins payé leur contribution du mois précédent, et qu’en conséquence on en donnât le nom au Vice-Président seulement qui vérifiera sur le registre des contributions (33) (…) ». Ainsi, on procède au double constat que des clubistes ne paient pas leur cotisation mensuelle et ils sont semble-t-il de ceux qui demandent un secours financier. Toutefois, cette approche conciliante ne s’avéra guère plus efficiente, tant et si bien qu’un membre proposa le 17 août 1791 que la Société envoyât des commissaires chez ceux qui ne payaient pas leur dû « pour les obliger à payer leur contribution (34) ». La situation ne s’améliorant pas, on proposa le 28 décembre que ceux qui n’avaient pas payé depuis 2 mois soient privés de la parole en séance (35), et actons que la prise de parole en séance est le cœur de la vie de la société, car la première marche des délibérations et de leur mise en action. Si l’on espérait une régulation immédiate, on n’obtint pas l’effet escompté : le lendemain, un membre proposa que l’on procède à un appel de ceux qui n’avaient pas payé leur contribution du mois (36). Ainsi, alors que la société n’avait qu’un an, la précarité de ses membres menaçait sa trésorerie. Si l’on constate, avec le développement du club et l’augmentation des effectifs, des recettes plus importantes, et notamment avec l’absorption par les Antipolitiques de la Société des Amis de la Constitution le 21 novembre 1792 (37) – Emeric, futur maire de la ville (38), et Lantelme, apportaient à la caisse de bienfaisance des Antipolitiques plus de 5700 livres (39) –, la société populaire compte toujours beaucoup de pauvres. D’ailleurs, à l’instar d’une confrérie, elle veille systématiquement à donner secours à ceux de ses membres dans le besoin, homme ou citoyenne fréquentant les séances.

Ici, c’est la pensée de Mably que les Antipolitiques paraissaient s’approprier, Mably qui écrivait en 1776 « Vous parlerai-je de la mendicité, qui déshonore aujourd’hui l’Europe, comme l’esclavage a autrefois déshonoré les républiques des Grecs et des Romains (40)? » Ainsi, tout au long de son existence, le club, qui commença des politiques sociales, prit à bras-le-corps le problème de l’indigence de nombre de ses membres, y compris au cœur de l’effort patriotique à fournir pour défendre la Patrie en danger. Au printemps 1793 par exemple, alors que la société populaire commence une vaste opération en vue d’équiper en bas et souliers les volontaires aux frontières, elle relève un problème matériel qui l’amène à mettre en cause la responsabilité des cordonniers, problème immédiatement mis à profit de ceux des siens dans la nécessité : « On a délibéré que les cordonniers qui n’auront pas fait les souliers comme le modèle qu’on leur a fait voir seront tenus de donner les mauvais souliers aux pauvres de la société (41). » Insistons sur le fait que la pauvreté ne touchait pas que les Antipolitiques hommes et que les femmes qui fréquentaient le club, qualifiées de sœurs, bénéficiaient également de la fraternité des clubistes. Le 21 février 1793, « sur une proposition du comité de surveillance, il est délibéré que l’on remettra à une de nos sœurs la somme de vingt-cinq livres par nécessité (42). » Le 3 germinal an II (23 mars 1794), les Antipolitiques avaient une « discussion à l’effet de l’inscription des Citoyens patriotes qui sont indigents pour leur faire tenir l’indemnité que la République leur a accordée (43). » Il fallait pour cela « se faire inscrire à la société ». Ici, les citoyens patriotes indigents et les Antipolitiques étaient confondus en une seule et même entité. Par ailleurs, nous disposons d’autres éléments nous permettant de relever les conditions modestes des Antipolitiques, du moins de la majorité d’entre eux.

À la lecture des sources, les difficultés d’écriture de bien des secrétaires sont évidentes. Certes, Albert Mathiez indiquait dans ses Cordeliers « L’orthographe de ce temps-là était infiniment moins arrêtée que celle de notre époque nivelée par l’école primaire (…) Les noms propres eux-mêmes n’avaient rien de rigide (44) ». Cependant, sur bien des procès-verbaux de délibérations, nous relevons que le, voire les secrétaires – on peut avoir trois écritures différentes sur le PV d’une même séance – ne suivent aucune règle du tout : l’orthographe est aléatoire, la syntaxe hasardeuse. D’ailleurs, ce sont toujours les mêmes clubistes que l’on charge de rédiger les adresses aux corps constitués. À l’an II, on se saisit même du problème beaucoup plus frontalement ; effectivement, lors de la séance du 4 prairial (23 mai 1794), « un membre propose et la société délibère de nommer un commissaire qui apprendra à lire à tous les frères qui le désireront (45)(…) ». D’ailleurs un mois plus tard, « après une longue discussion », on retirait à deux commissaires une mission sur « les cautions de la réquisition des prairies du district » car « ils ne savaient pas écrire (46)» ! La nécessité de savoir lire et écrire afin de mener à bien l’exercice démocratique avait été pleinement actée par les Antipolitiques d’Aix, tant et si bien qu’ils avaient défendu et exigé des politiques ambitieuses d’instruction publique, estimant que « l’individu honnête et instruit de quelque état qu’il soit pourra participer à toutes les charges (47) ». Ce souci de l’instruction publique n’avait pas qu’une portée sociale ; il rappelait en quoi les Antipolitiques s’inscrivaient dans la diffusion des principes nouveaux et la démarche des « missionnaires patriotes » provençaux identifiés par Jacques Guilhaumou (48) ; « missionnaires patriotes » en première ligne dans le combat contre les « aristocrates ».

II. La terreur des « aristocrates »

Aix avait élu une municipalité modérée. À sa tête, un avocat, Jean Espariat. Espariat est très populaire dans les premiers mois de son mandat. Cette popularité, il la doit notamment à l’audace dont il fit preuve le 26 mai 1790 – souvenons-nous que c’était le 9, cette même année, que s’était créée la société des Amis de la Constitution de la ville. Les soldats patriotes du Royal Marine étaient entrés en conflit avec leurs officiers, lesquels ne laissèrent pas s’installer la mutinerie. Alertés, les Aixois favorables à la Révolution s’étaient mobilisés. Les Marseillais poussèrent un autre régiment, le Royal Vexin, à mener une opération dans la capitale du département : Royal Marine et Royal Vexin se firent face, prêts à ouvrir le feu. Espariat s’interposa et apparut alors comme l’homme au-dessus des « factions », celui qui par sa mesure et sa tempérance évita que le sang ne coulât. Une position en réalité bien fragile en des circonstances qui appelaient, déjà, des actions de salut public ; mais, favorable à une « société d’ordre social » où la bourgeoisie se serait substituée à l’aristocratie d’Ancien Régime (49), il ne prit pas de mesures contre l’agitation contre-révolutionnaire qui sévit à Aix, notamment au moment de l’affaire Pascalis.

De quoi s’agit-il ? En 1790, Jean-Joseph Pierre Pascalis, un avocat du Barreau d’Aix qui s’était préalablement montré favorable à une réforme du royaume (50), se révéla très hostile à la dynamique populaire de la Révolution. Le 27 septembre, il prononça, « accompagné de sept ou huit hommes, disant faussement qu’il parlait au nom du ci-devant ordre des avocats (51) », à la chambre des vacations du département des Bouches-du-Rhône, un discours contre-révolutionnaire : « Puisse le ciel ôter le moment où nous gratifiant de ce nouveau bienfait, les citoyens détrompés se réuniront à l’envi pour assurer la proscription des abus de l’ancien régime, l’exécution de nos traités avec la France (52), le rétablissement de la monarchie, et avec le retour de nos magistrats, celui de la tranquillité publique (53). » Pascalis demandait le rétablissement de ce que Desmoulins avaient appelé le « despotisme parlementaire (54) » et laissait entendre que la Provence dût de nouveau être séparée de la France. Véritable brûlot, il fut perçu, par toutes les parties en présence, comme le signe de ralliement des royalistes qui s’établirent d’ailleurs en Société de la Paix, de la Religion et du Roi.

Les avocats membres de la Société des Amis de la Constitution répliquèrent immédiatement en publiant une Protestation des hommes de Loi (…) contre le discours anticonstitutionnel du Sieur Pascalis (55). C’est dans ce contexte et face à l’inaction des corps constitués que s’établirent les Antipolitiques. Aucune de leurs trois adresses ne généra une réaction de la municipalité, et ce, malgré le soutien préalable du département quant à l’effacement d’une inscription en provençal « en faveur du ci-devant parlement (56)». Le ton bienveillant et légaliste du début de la démarche effectuée par la société avait laissé place à un discours martial, la menace de l’insurrection avait été brandie : il fallait « étouffer ce nouveau despotisme » pour « (…) prévenir tout mouvement d’insurrection au peuple de cette ville qui est grandement vexé (57). » Les Antipolitiques déclamaient : « Provoquer les peuples c’est être traître à la Patrie et mériter d’être dévoré par (des jurys ?) (58). » En décembre, la société n’avait pas renoncé, bien au contraire, car exaspérée par la concession du département à la municipalité, à qui il recommandait « de poursuivre avec toute la diligence possible le jugement de l’affaire » Pascalis (59). Les clubistes, qui avaient exigé la destitution des juges d’Aix (60), prévenaient presque une ultime fois, exhortant par la même occasion les citoyens à prendre les armes : « (…) le peuple qui a juré de lui (la Constitution) être soumis tombera dans l’anarchie, et causera les plus grands ravages (61)», affirmant que le traître Pascalis « (…) doit le sacrifice de sa tête sous une lanterne (62)» ! Rien n’y fit, pas même les menaces de Guiramand, contre-révolutionnaire notoire (63) d’attenter à la vie des administrateurs (64). Par ailleurs, le Régiment de Lyonnais, suspecté d’aristocratie, stationnait à Aix (65).

Face au péril, les deux sociétés des Amis de la Constitution et des Antipolitiques fraternisaient le 12 décembre 1790 (66). En revenant du Collège Royal de Bourbon où siégeaient les premiers, le feu est ouvert sur la foule sur le Cours (67) – aujourd’hui Mirabeau. La foule réplique. C’est l’insurrection, elle allait durer trois jours ; les Antipolitiques firent aller chercher Pascalis entre-temps incarcéré (68) pour être protégé ! Il est pendu avec Guiramand et La Roquette, un autre aristocrate, sur le Cours, précisément là où l’on avait en mars 1789 exécuté de la sorte un « émeutier de la faim (69) ». La violence d’Ancien Régime était retournée contre ceux-là mêmes qui l’incarnaient et avaient menacé de saigner la ville.

Ces évènements de décembre 1790 sont, à n’en pas douter, l’acte de naissance véritable des Antipolitiques, dont désormais l’on saurait qu’ils étaient le bras armé des patriotes dans Aix et son pays bien sûr, mais bien au-delà. Ne prirent-ils pas l’initiative de lever une « armée de citoyens » pour marcher sur Manosque (70) dans les Basses-Alpes, où la vie des patriotes était menacée (71), avant d’envisager de réitérer l’opération pour en exiger le paiement (72) ? Ils avaient dû, cette seconde fois, renoncer devant le refus, l’interdiction des autorités départementales et du club jacobin de Marseille (73) ! Les Antipolitiques d’Aix exerceraient des pressions constantes sur les corps constitués, ce qui entraînerait dès leurs premiers mois d’existence des plaintes de ces derniers jusqu’à l’Assemblée Nationale ! Rive donnerait alors la réplique, dans sa lettre au Commissaire du Roi de janvier 1791 (74) – dont était extraite la citation du début de mon intervention. L’abbé pourfendait les autorités modérées, accusées de complicité avec les aristocrates : « Vous y lirez, Messieurs, les plaintes PIQUANTES que la Municipalité & les autres corps Administratifs, qui veulent se conduire en Aristocrates à notre égard Nous ont occasionnées. Ces plaintes PIQUANTES supposent des pétitions antérieures beaucoup plus douces & plus respectueuses que nous leur avons faites auparavant, & dont ils n’ont tenu aucun compte. »

Les patriotes « modérés » qui voulaient mettre fin rapidement à la Révolution n’hésiteraient pas non plus à tirer sur les Antipolitiques à boulets rouges. Ainsi, la Constitution de 1791 devait, selon ses Amis aixois, sonner le glas des revendications démocratiques et sociales. Le 9 octobre 1791, en même temps qu’il affirmait « Cette Révolution est enfin terminée » et dénonçant le « goût de l’anarchie » et « la haine des vrais patriotes », Chambes, homme de loi et président du club jacobin d’Aix, se lançait dans un pamphlet contre les Antipolitiques : «  dans le temps enfin que toutes les passions, tous les vices, tous les intérêts particuliers l’emportaient sur le patriotisme, sur les vertus, sur l’intérêt général. Notre Société fut longtemps calomniée (75) et persécutée par quelques hommes qui avaient pris l’exaltation pour le patriotisme, leurs caprices pour des Lois, leur intérêt particulier pour l’intérêt public, la licence pour la liberté, et qui ne cherchaient dans la Révolution qu’un prétexte à leurs excès (76). » D’une certaine manière, les Amis de la Constitution d’Aix avaient pris acte de la loi Le Chapelier votée en septembre 1791 et qui, indubitablement, avait freiné les actions des clubs, de surcroît des Antipolitiques.

L’Atlas de la Révolution française consacré aux sociétés politiques indique « Les derniers mois de 1791 et le début de l’année 1792 voient la rupture d’une dynamique (77). » Et c’est bel et bien début 1792 que les Antipolitiques reviennent très frontalement au combat, notamment avec la lettre adressée à Louis XVI. Ils font de la lutte contre les aristocrates locaux ou nationaux un même combat, ce qui les conduit le 26 juillet 1792 à délibérer d’ « écrire une circulaire aux Sociétés affiliées de leur département pour les inviter à (…) venir se réunir avec les antipolitiques d’Aix à l’effet de former un Bataillon d’antipolitiques, c’est-à-dire un Bataillon inaccessible aux modérés (78). » D’ailleurs, deux d’entre eux, Aime et Pascal, seraient élus par la société pour se porter à Paris, et remettre entre les mains du commandant du bataillon des Marseillais la somme remise par le trésorier (79). Ils participeraient à la prise des Tuileries.

L’entrée en République semble conforter la position des Antipolitiques dont la radicalité est perçue comme un gage de sincérité dans la lutte contre les « aristocrates », d’autant plus après le retour d’Ayme et Pascal à Aix. Ainsi, en décembre 1792, alors que les Antipolitiques sont probablement à leur apogée, des députations des sections de la ville se présentent au club afin de solliciter la permission de changer de nom. La section des Petits Carmes présente en effet une pétition ayant obtenu adhésion de l’ensemble des sections ; elle souhaite désormais s’appeler la section des Sans-Culottes 80). Les autres suivent. Quelque chose de l’ordre d’un « adoubement républicain » – oxymore – se joue alors. L’occasion pour les Antipolitiques de faire remarquer à l’une des sections les plus riches de la ville, celle du Collège ci-devant Royal de Bourbon, qu’elle ne s’était pas jusqu’alors illustrée par ses démonstrations de patriotisme. Effectivement, ayant obtenu l’accord des autres sections de « se dénommer la Section de la Révolution (…), la Société y adhère mais en observant aux députés que cette section n’a pas dans des occasions importantes donné des preuves aussi vigoureuses de patriotisme que le nom qu’elle veut prendre indique et qu’elle ne donne son adhésion que parce qu’elle est persuadée qu’à l’avenir cette section agira avec plus de force (81). » Relevons immédiatement qu’il s’agit de la section de la société des Amis de la Constitution de la ville, société qui avait été plus ou moins appuyée par les jacobins marseillais dans sa rivalité avec les Antipolitiques, mais qui paie cher son modérantisme. Dépassée par les agriculteurs et les artisans réunis en club, elle finit, non pas à fusionner avec lui, mais à voir ses membres intégrer la société rivale, après avoir été triés sur le volet (82).

Nonobstant, les Antipolitiques n’auraient-ils pas été victimes de leur succès ? Cette intégration d’anciens Amis de La Constitution, puis de la Liberté et de l’Égalité (83), accentuerait les crises internes aux Antipolitiques. C’est le procès du roi qui ouvrirait une entaille qu’il serait difficile de refermer (84), entraînant des désaccords importants quant à la question de l’appel au peuple et au rôle dévolu aux sections, le tout dans le contexte très singulier des fédéralismes provençaux analysés par Jacques Guilhaumou (85). Les Antipolitiques se laissent ensuite entraîner dans un combat sans merci contre l’ensemble de la municipalité d’Aix, qui compte déjà des clubistes (86), à partir d’une lettre écrite à Beurnonville, par ladite municipalité contre le bataillon d’Aix (87), remise aux représentants du peuple envoyés à Toulon. La Commune, pour assurer sa survie, se lie alors aux sections (88), en prise avec le club dès le début du printemps 1793, et qui le fermeraient à la veille de « l’insurrection fédéraliste », le 8 juin 1793 (89). À l’issue de cette révolte, les Antipolitiques régénérés et dont Aymeric serait élu maire d’Aix, assimileraient les « infernales sections » à la Contre-Révolution ; « Contre-Révolution » dont le ciment était la religion, pourfendue par les Antipolitiques.

III. Les Antipolitiques, fer de lance contre le fanatisme religieux

À l’origine de ce combat sans concession, il y a certainement la position tranchée de l’abbé Rive à l’endroit de l’institution ecclésiastique, bien que l’étant lui-même. Rive, véritable « homme bibliothèque (90) », érudit à la réputation solidement établie dans l’Europe de la fin du XVIIIe siècle, avait été recruté en 1786 par l’archevêque d’Aix Boisgelin afin qu’il fût bibliothécaire de la Méjanes, trésor légué par le Marquis éponyme aux États de Provence, à la condition que celle-ci restât ouverte à tous (91). Rive ne reçût-il pas les traitements prévus ainsi qu’il l’affirme dans sa seconde lettre aux Commisaires du Roi (92)? Toujours est-il qu’il ne resta pas longtemps en poste et enragea contre les États de Provence et son ancien « employeur ». Effectivement, Boisgelin est la cible de l’abbé dans ses Lettres violettes et noires ou anti-épiscopales et anti-grandvicariales, où il y est désigné comme étant rien moins que le « perfide violet » et « l’archi-despote (93)». Il ne serait pas exagéré de dire que Rive était anti-clérical. C’est moins la religion chrétienne que son Église qu’attaquait Rive – et sur cette question il serait largement dépassé par ses disciples, qui finiraient par adopter des postures anti-religieuses.

Dans la Lettre de l’Abbé Rive à son trés-cher et trés-illustre ami Camille Des-Moulins, Sur l’extirpation du Fanatisme créé par les Despotes, depuis que le despotisme s’est perché sur les Thrônes datant du 31 mars 1791, Rive écrit : « On veut y voir régner la véritable philosophie ; & au lieu d’y réduire le Christianisme en secte, en lui ôtant tous ses indignes Prélats qui y sont la cause infernale de tant d’anti-révolutions, on l’y conserve comme la religion précieuse de nos pères, & on a le malheureux aveuglement d’en salarier les Ministres et le culte aux dépens de toute la Nation Française (94). » Rive avait souhaité la suppression du budget des cultes (95) avant que Cambon n’en fasse la proposition à la Convention en novembre 1792. L’abbé Rive n’était cependant pas un autre abbé Meslier, il restait profondément déiste.

La défiance à l’encontre de l’Église et même, d’une certaine manière, du culte, était explicitement affirmée dès l’établissement du cercle antipolitique. Serait-ce le Vice-Président Guerin qui prit alors la parole ou Rive lui-même (96) ? Il posait la dimension « spirituelle » de la Société et opposait « la religion extérieure » et « la vraie religion (97) ». L’orateur affirmait avec force : « Vous êtes libres, vous ne devez à cette Religion inventée par les hommes seuls d’autre confiance intérieure, et d’autre respect extérieur que celui que vous impose à son égard l’ordre civil qui vous gouverne, parce que c’est cet ordre seul qui a pu autoriser vos prétendus inspirés à l’établissement de leurs cérémonies extérieures (98). » L’institution ecclésiastique était dénoncée comme oppresseur, le culte comme instrument politique de contrôle social au service de cette institution. Sans toutefois rejeter pleinement la religion, du moins pour l’heure, – les Antipolitiques solliciteraient le métropolitain pour bénir le drapeau anglais le 15 janvier 1792 (99), comme ils l’avaient sollicité pour bénir du pain le 2 août 1791 (100) ; ou encore avait délibéré « que pétition serait faite à la municipalité pour faire faire des prières par leur (notre) digne pasteur (…) pour la pluie, vu la nécessité que la terre en a (101) » –, ils contribuaient néanmoins à façonner une « religion civique ». Cette « religion civique » que l’on perçoit épouse la sociabilité politique, l’engagement dans un club étant l’une des démonstrations les plus vives du patriotisme et, nous l’avons vu, les Antipolitiques ont la ferme conviction de la pureté de leurs sentiments. Ne dit-on pas à la tribune, ce 1er novembre 1790 : « Cette vraie religion ne réside que dans vos cœurs, et ne demande à vos esprits et à vos consciences que des actes vrais, justes et utiles à la Patrie » ? Avant d’ajouter : « Aucune religion extérieure n’a d’emprise à former contre vous (102). » C’est parce que les Antipolitiques avaient immédiatement pris conscience du lien indéfectible entre la religion et la contre-révolution qu’en décembre 1790, alors que la ville était traumatisée par les événements du 12 au 14, ils avaient pétitionné « (…) d’ordonner aux curés de la ville l’interdiction de la messe de minuit, attendu les fâcheuses circonstances et d’en faire la publication par la ville (103). » Le 23 novembre, ils avaient été jusqu’à avertir que depuis la Déclaration des Droits de l’Homme, ils ne toléreraient pas « (…) dans Aix tous les croyants au pape (104) (…) ».

La société défend la Constitution civile du clergé – elle députe d’ailleurs au district le 3 février 1791 trois commissaires pour qu’on lui remette le décret « sur l’instruction civile du Clergé (105) » – et attaque violemment les prêtres réfractaires. Le 8 août, les Antipolitiques pétitionnent à la municipalité contre le clergé « non-jureur » et députent pour cela six commissaires (106). Mais les Antipolitiques ont conscience que les déclarations d’intention peuvent rester lettres mortes. Ils ne comprennent pas que l’on permette au culte réfractaire d’exister à côté du culte constitutionnel (107), pis, que l’on pût financer de facto la Contre-Révolution. Ainsi, le 10 août 1791, ils dénoncent à l’Assemblée Nationale et à tous les clubs (108) « (…) pour que les prêtres réfractaires n’aient plus aucune pension de l’État (109). » Le 30 mai 1792, ils pétitionnent à la municipalité d’Aix pour qu’elle exigeât du supérieur de l’Oratoire qu’il prête son serment ou qu’elle l’expulse de la maison de l’Oratoire (110). L’avènement de la République amène les Antipolitiques à durcir encore leurs positions ; les clubistes passent de la méfiance accrue à l’hostilité revendiquée à l’encontre de l’Église catholique et de la religion. Leur regard suspicieux est porté dans une perspective plus profonde, la volonté des clubistes d’ébranler l’Église catholique assimilée à la contre-révolution justifie leur détermination à abattre tout élément qui tend peu ou prou à symboliser un ordre religieux. Ainsi, en décembre 1792, la société « délibère qu’il sera fait pétition à la municipalité afin que l’ancienne croix de Malte qui existe au clocher de l’église St-Jean (qui) soit ôtée sur-le-champ (111) » Au cœur du combat contre-révolutionnaire, forts de ce qu’ils constatent, les Antipolitiques estiment qu’il y a l’ecclésiastique. En janvier 1793 par exemple, ils sont mobilisés par des troubles qui concernent la société de Meyrargues – une commune à proximité d’Aix – qui leur est affiliée, et ils n’entament pas une négociation. Leur délibération est sans appel :

« (…) il sera écrit une lettre à nos frères de Meyrargue pour les inviter à mettre hors de leur sein le curé jusqu’à ce qu’il (se) soit justifié de la dénonciation faite contre lui au district, que faute de le faire on retirera l‘affiliation et (on) invitera celle de Marseille à la lui ôter de même (112). »

L’affaire prit une tournure très grave, le curé de Meyrargue venant dans Aix à la tête de deux cents clubistes (113) à ce point sous son emprise que l’on constatait, le 21 janvier 1793, que « la disculpation du curé présentée par Les citoyens formant la Société de Meyrargues » était « signée par le curé lui-même (114) » !

Les Antipolitiques étaient horrifiés à l’idée qu’un curé contre-révolutionnaire puisse profiter de son assise et de sa fonction sacerdotale pour détourner des citoyens des principes républicains. D’ailleurs, ils avaient décidé la veille que plus aucun prêtre ne serait reçu dans la société (115) – elle en comptait alors trois – et ils pétitionnaient même à la municipalité en mars relativement à l’interdiction aux prêtres fonctionnaires du culte d’occuper d’autre place que celle de la paroisse « attendu que leurs occupations spirituelles sont incompatibles avec les temporelles (116) ».

Les connivences avec les émigrés et les complots ourdis de l’étranger, ou tout simplement les manœuvres des « aristocrates », n’étaient pas étrangers à ces prises de position. En effet, dans un contexte où ils s’inquiètent des modalités de distribution des certificats de résidence et de civisme aux étrangers à la ville d’Aix (117), les Antipolitiques s’en prennent directement au recteur de l’œuvre de la Miséricorde et demandent qu’on l’en remerciât (118). Les Antipolitiques d’Aix ne cherchaient pas seulement à faire tomber les préventions, mais à faire tomber l’institution religieuse elle-même ; aussi leur stratégie, particulièrement offensive, fut résolument frontale ! Ils avaient par exemple pétitionné à la « municipalité afin qu’elle fasse une proclamation qui ordonne que les prêtres ne paraissent plus en public en soutane (119) » ; c’était bien avant la loi du 21 février 1795, puisque la pétition avait été délibérée le 5 octobre 1792. Certes, il ne s’agissait pas d’une mesure originale ni à proprement parler anticléricale. Les Antipolitiques voulaient contraindre les prêtres à intégrer le corps des citoyens sans qu’ils n’affichent de signe et donc de statut distinctifs, mais cette mesure s’insérait bien dans un contexte général d’ébranlement de la religion elle-même, qui était amené à s’accentuer encore et encore.

D’ailleurs, le Comité de Révision – entendre d’épuration de la société régénérée – délibérait le 28 pluviôse an II (16 février 1794) que « les discussions au sujet de la religion ramenaient toujours le désordre dans les sociétés, qui ne devaient s’occuper que du triomphe de la liberté (120) ». Insistant sur la protection de la loi garantie aux cultes – le Comité de Révision semblait craindre que la déchristianisation violente ne fût « un moyen de faire lever la tête à quelques fanatiques », en cela il adoptait une position semblable à celle de Robespierre –, il prenait néanmoins une résolution ambivalente. Le comité de révision proposait « que le premier membre qui se permettrait d’agiter des questions sur la religion serait expulsé pour dix ans (121) ». S’agissait-il de préserver la religion des attaques, ce que ne firent jamais les clubistes ni avant ni après cette délibération, ou les Antipolitiques estimaient-ils que désormais, la religion était une affaire d’ordre privé ? Cette hypothèse s’accorde mieux avec les résolutions prises par la société depuis au moins l’entrée en République ; du reste, le Comité émettait un vœu qu’il convenait désormais de présenter en séance plénière.

La société se révélerait être finalement sur la ligne hébertiste, les Antipolitiques participant activement à la déchristianisation de l’an II. Contribuant à faire de la cathédrale d’Aix un Temple de la Raison (122), ils étaient sollicités en germinal an II par la société de Gardanne afin d’assister à une fête dans le Temple de la Raison de cette Commune (123). Surtout, à la suite d’une lettre d’Albitte, ils se félicitent que « (…) des hommes dont le métier a été jusqu’à présent d’être prêtre », l’aient « enfin abdiqué », allant jusqu’à délibérer que « (…) ces listes seront affichées dans la salle de la société (124). » Enfin et surtout, dans la foulée de cette délibération, les Antipolitiques proclamaient la chute des cultes en même temps qu’ils revendiquaient la filiation de la Révolution et de la France laïcisées aux Lumières de la philosophie. En effet, lors de la séance du 11 germinal an II (31 mars 1794), « Un membre, au nom du comité, annonce à la société que les prêtres qui étaient encore dans cette Commune ont abdiqué leurs fonctions et que la raison et la philosophie ont renversé tous les cultes (125)» ; effectivement, il ne s’agissait pas seulement d’envisager le seul catholicisme comme obstacle à la raison et aux progrès de la Révolution portés par une République que les clubistes voulaient complètement laïcisées, puisqu’ils se félicitaient également que « les citoyens attachés au culte israélite » avaient fait d’eux-mêmes l’abandon, nous supposons des fonctions de rabbins. Pour célébrer ce triomphe de la raison sur les cultes, la société délibérait « de faire une adresse à la Convention Nationale pour l’instruire qu’il n’exist(ait) plus parmi (les Antipolitiques) de prêtres », puisque tous avaient « abdiqué leurs fonctions (126) ». Relevons que c’est au début de cette même séance qu’alors que les Antipolitiques lisaient un « nouveau catéchisme républicain », la société délibérait « que dans chaque séance on en lira une partie pour l’instruction publique et qu’en outre (elle) en demandera la lecture chaque decadi dans le temple de la raison ». Les Antipolitiques étaient parvenus à imposer la République, ses principes et son credo jusqu’au cœur de l’ancienne cathédrale dont les chanoines avaient jadis essayé de souffler sur les braises de la Contre-Révolution et d’« armer le bras du fanatique (127)».

Concluons. Les Antipolitiques ne furent ni un club limité à la promotion dans leur Commune de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, ni simplement un « satellite » de la Société de Marseille ou leur tête de pont dans la ville d’Aix et sa campagne environnante. Bien entendu, les Antipolitiques ne purent jamais se placer « au-dessus » des puissants Jacobins marseillais, avec lesquels ils entretinrent des relations ambivalentes, et ce, jusqu’à se lier un temps aux 24 sections de la cité phocéenne (128). Pour autant, les actions prépondérantes des Antipolitiques, leurs opérations aussi bien purement locales que celles d’envergure nationale, leur permirent de se placer presque à la tête du mouvement populaire provençal. Au printemps 1793, les Antipolitiques d’Aix tenaient un réseau, certes remuant, de plus de 80 sociétés affiliées ; comprenons qu’il s’agissait d’un réseau antipolitique, donc d’un réseau régional autonome, quoique lié aux Jacobins.

Les Antipolitiques mirent sur pied des opérations armées ; nous avons évoqué la marche sur Manosque, mais prenons acte qu’ils se mobilisèrent avec vélocité dans la défense de Toulon assiégé puis livré aux Anglais (129), et semblèrent entretenir une correspondance avec Carteaux (130). Si leur engagement révolutionnaire les plaça souvent en opposition frontale aux corps constitués, des élus comprirent rapidement le crédit patriotique qu’il pouvait tirer de leur soutien affiché à ces cultivateurs et artisans – quoique bientôt rejoints par des notables aixois –, ainsi Moïse Bayle, qui compte parmi leurs membres (131) et qui, une fois conventionnel, leur adresserait tous les jours le bulletin de la Convention Nationale (132) .

Les Antipolitiques d’Aix envisagèrent toujours la défense armée de la Patrie corrélée d’une part à une œuvre radicale de laïcisation de la société et, d’autre part, à des politiques sociales ambitieuses, ne rechignant pas au besoin à la coercition. Effectivement, ils n’hésitent pas à exercer des pressions très fortes sur les boulangers (133) , par exemple quand ceux-ci vendent des pains de qualités différentes en fonction de la monnaie avec laquelle on les paie : avec « des espèces sonnantes les boulangers délivrent du plus beau pain que pour des assignats, tandis qu’on le(s) paye sept deniers de plus pour des papiers (134) » dénonçaient-ils le 1er février 1792. En 1794, ils sont majoritairement des défenseurs acharnés du Maximum et de son application (135) ; majoritairement et non unanimement car la municipalité alors antipolitique fait valoir au club, à l’occasion de la séance du 23 floréal an II (12 mai 1794), que tous les clubistes ne respectaient pas la loi (136). Les Antipolitiques ne perdirent jamais de vue que la Révolution, puis la République, devaient d’abord être au service des pauvres. D’ailleurs, à l’entrée en République, on commence à dater les procès-verbaux de l’an I de l’Égalité (137). Leurs séances ne furent-elles pas ouvertes aux femmes (138) ? La question du rôle des femmes revient régulièrement aux Antipolitiques, de surcroît dans le cadre de ce que l’on pourrait appeler une « mixité incomplète ».

Notes

(1) AD BR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 25 octobre 1791.

(2) Gallica, BNF, 8 – LN27 – 34846 (6) : Lettres des vénérables frères antipolitiques et de l’abbé Rive, présentée à MM. Les commissaires du Roi, dans le département des Bouches-du-Rhône, le 13 janvier 1791 avec une autre lettre du même abbé Rive, aux mêmes commissaires, « J’ose vous assurer, Messieurs, que c’est moi qui les dirige dans toutes les motions principales qu’ils changent ensuite en pétition devant tous nos corps administratifs. », p. 20.

(3) Le terme est employé par Michel Vovelle, Histoire d'Aix-en-Provence, coll., Aix, Edisud, 1977, p. 234.

(4) Gallica, BNF, 8 – LN27 – 34846 (6), op. cit., p. 16.

(5) AD BR, L 2025 : Installations des Sociétés populaires, admissions, exclusions, tableaux des membres de la société populaire régénérée, transferts des sièges de la Société, 1790 – an III, Cercle des Antipolitiques établi dans la ville d’Aix le 1er novembre 1790 – Discours des associés à la Municipalité pour l’érection de leur cercle, p.1.

(6) Fond patrimonial de la bibliothèque municipale Méjanes d’Aix en Provence, Aff. 1792, 2 : Adresse des citoyens actifs, connus dans la ville d’Aix, sous le nom des frères anti-politiques, portant adhésion solennelle de leurs frères de Caen, à l’Assemblée nationale (suivie de) Adhésion des Amis de la Constitution de cette ville ; adresse aux Législateurs, 1er janvier 1792.

(7) Albert Mathiez, Le Club des Cordeliers pendant la crise de Varennes et le massacre du Champs-de-Mars, Nouveaux documents inédits, publiés avec des éclaircissements et des notes, Librairie ancienne Honoré Champion, 1913, Ip. 7.

(8) « Les patriotes se sont précocement regroupés dans des clubs : dès le 9 mai 1790, un club des Amis de la Constitution rassemble hommes de loi, marchands, membres des professions libérales, municipaux aussi. », Michel Vovelle, op. cit., p. 234.

(9) ADBR, L 2025 : Cercles des Antipolitiques établis dans la ville d’Aix le 1er novembre 1790, Discours prononcé par Monsieur Silvacane, Secrétaire de la Société, 2de Séance.

(10) Ibid., p. 5.

(11) Il faut néanmoins relever que l’opinion de l’abbé Rive est à cet égard plus tranchée. Il écrit en effet à Camille Desmoulins « Je suis Français, par conséquent je suis homme libre, &. Je trouve qu'il n'y a plus de politique à garder, quand on a le privilège de l'exercice de la liberté. » , BNF, 8-LN27-34846 (3), Lettre de l'abbé Rive a son trés-cher et trés-illustre ami Camille Des-Moulins, sur l'extirpation du fanatisme créé par les despotes, depuis que le despotisme s'est perché sur les thrônes, 31 mars 1791, mise en ligne 16/12/2013, p. 5.

(12) ADBR, L 2025 : Cercles des Antipolitiques établis dans la ville d’Aix le 1er novembre 1790, Discours prononcé par Monsieur Silvacane, Secrétaire de la Société, 2de Séance, p. 4.

(13) Ibid., p. 5.

(14) Ibid., p. 4.

(15) Ibid., pp. 4-5.

(16) Fond patrimonial de la Bibliothèque municipale Méjanes d’Aix en Provence, Aff. 1792, 2 : Adresse des citoyens actifs, connus dans la ville d’Aix, sous le nom des frères anti-politiques, portant adhésion solennelle de leurs frères de Caen, à l’Assemblée nationale (suivie de) Adhésion des Amis de la Constitution de cette ville, 1er janvier 1792, p. 2.

(17) Ibid., p. 1.

(18) Ibid.

(19) Ibid.

(20) Albert Mathiez, op. cit., p. 9.

(21) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 3 avril 1791, le vice-président poursuit « et que tous les membres qui étaient en arriérés ne doivent plus rien jusqu’à ce jour », p. 87.

(22) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 1er mai 1791, p. 94.

(23) ADBR, L 2031 : Procès-verbal de délibérations du 24 prairial an II-12 juin 1794, p. 79/253.

(24) Albert Mathiez, op. cit., p. 9.

(25) Claude Taccetti, La société populaire des Anti-politiques d’Aix, mémoire de maîtrise en deux volumes dirigé par Michel Vovelle, Université de Provence, 1969.

(26) Albert Mathiez, op. cit., p. 18.

(27) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 25 janvier 1791, p. 79. On décida par ailleurs le 14 juillet 1792, poussé par la nécessité de mobiliser les patriotes contre le danger royaliste, que les séances seraient publiques jusqu’à la décision de délibérer autrement, ADBR, L 2027, p. 25.

(28) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 27 février 1791, p. 83.

(29) Ibid.

(30) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 28 avril 1791, p. 93.

(31) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 20 mai 1791, p. 100.

(32) Ibid.

(33) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 2 juin 1791, p. 104.

(34) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 17 août 1791, p. 123.

(35) AD BR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 28 décembre 1791, p. 153.

(36) AD BR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 29 décembre 1791, p. 153.

(37) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibération du 21 novembre 1792, p. 7.

(38) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibération du 22 octobre 1793, p. 140.

(39) Ibid. 5716 livres 4 sols et 6 deniers, dont plus de 2000 livres en promesses de dons de souscripteurs.

(40) Gabriel Bonnot de Mably, De la législation, ou Principes des lois, 1776, Abebooks, 2018, p. 52.

(41) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 19 avril 1793, p. 116.

(42) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 21 février 1793, p. 67.

(43) ADBR, L 2031 : Procès-verbal de délibérations du 3 germinal an II (23 mars 1794), p. 17/108.

(44) Albert Mathiez, op. cit, Introduction, p. III.

(45) ADBR, L 2031 : Procès-verbal de délibérations du 4 prairial an II (23 mai 1794), p. 63/215.

(46) ADBR, L 2031 : Procès-verbal de délibérations du 1er messidor an II (19 juin 1794), p. 84/263.

(47) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 13 novembre 1790, p, 7.

(48) Jacques Guilhaumou, Marseille républicaine (1791-1793), Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 1992.

(49) Michel Vovelle écrit : « Personnage représentatif des « élites » bourgeoises qui forment la municipalité, Espariat est homme d’ordre : partisan de la liberté des grains comme de la légalité ; (…) », puis poursuit « (…) une révolution conservatrice se donne par ces images apaisantes l’illusion de dominer le cours des choses. » Histoire d'Aix-en-Provence, op. cit., p. 233.

(50) « Au 29 décembre (1788), cette assemblée (des trois ordres), nombreuse, associe à des marchands, des artisans, des robins, aux consuls même le maigre contingent de six nobles et trois ecclésiastiques : du moins Pascalis et D’André y font-ils triompher les mots d’ordre à la fois provincialistes et d’un libéralisme qui apparaîtra sous peu bien timoré, que l’assemblée souhaite présenter au roi. » Histoire d'Aix-en-Provence, op. cit., p. 231.

(51) AM Aix, LL 75 : Relation des troubles arrivés à Aix les 12 et 14 décembre 1790 rédigés par la municipalité d’Aix le 17 mars 1791.

(52) Pascalis était « provincialiste ». Il espérait que le mouvement révolutionnaire aboutirait à un retour au système féodal et la « souveraineté » des Parlements sur les Provinces.

(53) Fond patrimonial de la bibliothèque municipal Méjanes d’Aix en Provence, Aff. 1790.09.27 : Discours prononcé par M. Pascalis avocat, ancien assesseur, à l'audience de la chambre des vacations du parlement de Provence le 27 septembre 1790.

(54) « Nous crions tous deux contre la tyrannie, dit le personnage de Linguet à Bergasse : vous contre le despotisme ministériel, moi contre le despotisme parlementaire. » Hervé Leuwers, Camille et Lucile Desmoulins, Paris, Fayard, 2018, p. 75.

(55) Fond patrimonial de la bibliothèque municipal Méjanes d’Aix en Provence, Aff. 1790.10.12, 2 : Protestation des hommes de loi, membres de la Société des amis de Constitution, séante à Aix. Contre le discours anti-constitutionnel du sieur Pascalis, prononcé pardevant la chambre des vacations...assisté des sieurs Dubreuil cadet, Alphéran, Guieu...

(56) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 23 novembre 1790, p. 22.

(57) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 17 novembre 1790, pp. 15-16.

(58) Ibid., p.17.

(59) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 3 décembre 1790, p. 25.

(60) Ibid., p. 24.

(61) Ibid., p.25.

(62) Ibid.

(63) AM Aix, LL 75 : Relation des troubles arrivés à Aix les 12 et 14 décembre 1790 rédigés par la municipalité d’Aix le 17 mars 1791.

(64) « Des avis portaient qu’avant le mois de janvier, la constitution essuierait une attaque violente dans toute la France et notamment dans notre province, voisine de Nice. Divers propos annonçaient que les anti-révolutionnaires croyaient leur triomphe prochain ; il était même échappé au sieur Guiramand de faire entendre que la vie des administrateurs serait bientôt attaquée. » AM Aix, LL 75 : Relation des troubles arrivés à Aix les 12 et 14 décembre 1790 rédigés par la municipalité d’Aix le 17 mars 1791.

(65) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 13 novembre 1790, p. 4.

(66) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 12 décembre 1790, p.32-33.

(67) Plusieurs citoyens sont blessés. Le peuple crie : « Aux armes ! Ils sont armés, c’est un coup monté. » AM Aix, LL 75 : Relation des troubles arrivés à Aix les 12 et 14 décembre 1790 rédigés par la municipalité d’Aix le 17 mars 1791.(68)

(68) AD BR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations de décembre 1790, 1e jour n’est pas lisible, p. 33.

(69) AM Aix, LL 75 : Relation des troubles arrivés à Aix les 12 et 14 décembre 1790 rédigés par la municipalité d’Aix le 17 mars 1791.

(70) ADBR, L 2027 : procès-verbal de délibérations du 19 août 1793, p. 41.

(71) Jacques Guilhaumou, Marseille républicaine (1791-1793), op. cit., p. 111.

(72) ADBR, L 2027 : procès-verbal de délibérations du 24 octobre 1793, p. 77. Voir aussi Jacques Guilhaumou, Marseille républicaine (1791-1793), op. cit., p. 111.

(73) ADBR, L 2027 : procès-verbal de délibérations du 27 octobre 1792, p. 77.

(74) Gallica, BNF, 8 – LN27 – 34846 (6), Lettres des vénérables frères antipolitiques…, op. cit. Il indique : « Ces plaintes PIQUANTES. Ce n'est pas nous qui les appelons ainsi ; nous ne leur donnons d'autres noms que ceux de plaintes très justes. Nous ne les nommons plaintes piquantes que pour bien faire observer au Public impartial, & véritablement Démocrate & Démophile, combien les membres Aristocrates de nos administrations se sentent déchirés pour les avoir si bien méritées. », p. 6.

(75) Selon Claude Taccetti (op. cit.), Rive dénonça à l’Assemblée nationale la Société des Amis de la Constitution comme royaliste. Nous n’avons pas trouvé le document dans les fonds étudiés.

(76) AM Aix, LL 283-3 : Discours prononcé par Monsieur Chambes, Homme de Loi, Président des Amis de la Constitution, séante au Collège national à Aix, dans la séance du 9 octobre 1791, l’an troisième de la Liberté, jour auquel la Société a célébré l’achèvement de la Constitution française.

(77) Jean Boutier, Philippe Boutry, Serge Bonin, Atlas de la Révolution française, volume 6, Les sociétés politiques, Paris, Editions de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, 1992, p. 9.

(78) ADBR, L 2027 : Procès-verbal de délibérations du 26 juillet 1792, séance à midi, p. 29.

(79) ADBR, L 2027 : Procès-verbal de délibérations du 4 juillet 1792, pp. 22-23.

(80) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 23 décembre 1792, p. 23.

(81) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 27 décembre 1792, p. 26.

(82) ADBR, L 2027 : procès-verbal de délibérations du 12 septembre 1792, p. 52.

(83) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibération du 9 novembre 1792, p. 2.

(84) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 25 janvier 1793, p. 45.

(85) Jacques Guilhaumou, Marseille républicaine (1791-1793), op. cit.

(86) ADBR, L 2029 : procès-verbal de délibérations du 16 avril 1793, p. 114.

(87) Ibid.

(88) ADBR, L 2029 : procès-verbal de délibérations du 1er mai 1793, p. 4.

(89) ADBR, L 2029 : page du 8 juin 1793, p. 28.

(90) François Moureau, L’abbé Rive ou l’homme-bibliothèque : une "physiologie provençale", Babel, Littératures plurielles, 2002, p. 105-125.

(91) « (…) en 1786, cet Arlésien décide de donner sa bibliothèque à la province de Provence (…) sous condition d’en tenir une bibliothèque ouverte en la ville d’Aix, pour l’avantage du public auquel la dite bibliothèque sera destinée (…) », Jean Stouff, Les bibliothèques publiques d’Aix en Provence au XVIIIe siècle, Annales du Midi, 2002, p. 306.

(92) Lettre de l’abbé Rive à son bon-ami, le très illustre Camille Desmoulins, dans Lettres des vénérables frères antipolitiques et de l’abbé Rive, présentée à MM. Les commissaires du Roi, dans le département des Bouches-du-Rhône, le 13 janvier 1791 avec une autre lettre du même abbé Rive, aux mêmes commissaires, le 14 janvier 1791, p. 15.

(93) Ibid.

(94) Gallica, BNF, 8 – LN27 – 34846 (6) : Lettre de l’abbé Rive à son bon-ami, le très illustre Camille Desmoulins, p. 30, dans Lettres des vénérables frères antipolitiques et de l’abbé Rive, présentée à MM. Les commissaires du Roi, dans le département des Bouches-du-Rhône, le 13 janvier 1791 avec une autre lettre du même abbé Rive, aux mêmes commissaires.

(95) Gallica, BNF, 8-LN27-34846 (3), Lettre de l'abbé Rive a son trés-cher et trés-illustre ami Camille Des-Moulins, sur l'extirpation du fanatisme créé par les despotes, depuis que le despotisme s'est perché sur les thrônes, 31 mars 1791, mise en ligne 16/12/2013, il y écrit notamment « Est-il possible, très-cher ami, que de vrais philosophes du 18me siècle ne veuillent que l’abaissement du haut clergé, et des ménagements pour celui qui est au-dessous ? Il faut de toute nécessité la destruction de l’un et de l’autre pour grandement honoré la divinité. », p. 20.

(96) Il est permis de se poser la question tant nombre d’expressions de l’orateur, telles « Prétendus inspirés », sont quasi semblables à celles dont Rive use dans sa lettre à Desmoulins sur l’extirpation du Fanatisme créé par les Despotes, op cit.

(97) ADBR, L 2025 : Cercles des Antipolitiques établis dans la ville d’Aix le 1er novembre 1790, Discours d’ouverture, p. 2.

(98) Ibid., p. 3.

(99) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 15 janvier 1792, p. 163.

(100) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 2 août 1791, p. 120.

(101) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 9 août 1791, p. 122.

(102) ADBR, L 2025 : Cercle des Antipolitiques établis dans la ville d’Aix 1er novembre 1790, Discours lu à l’honorable Assemblée des Antipolitiques, p. 2-3.

(103) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations de décembre 1790, jour illisible, p. 40.

(104) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 23 novembre 1790, p. 28.

(105) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 3 février 1791, p. 80.

(106) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 8 août 1791, p . 121.

(107) « Quelques semaines plus tard (après le 11 avril 1791), la Constituante, par son décret du 7 mai 1791, étendit à toute la France la tolérance accordée aux dissidents parisiens. (…) Comment lutteraient-ils (les prêtres constitutionnels) contre leurs concurrents, dans cette moitié de France qui leur échappait déjà, si l’autorité publique maintenant se déclarait neutre après les avoir compromis ? », Albert Mathiez, La Révolution française, 3ème édition, Bartillat, 2012, p. 156.

(108) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 10 août 1791, p . 122.

(109) « Elle (l’Assemblée constituante) accorda aux curés destitués une pension de 500 livres. », Albert Mathiez, La Révolution française, op. cit., p. 154.

(110) ADBR, L 2027 : Procès-verbal de délibérations du 30 mai 1792, p. 15.

(111) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 30 décembre 1792, p. 27.

(112) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 17 janvier 1793, p. 37.

(113) Ibid., p. 41.

(114) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 21 janvier 1793, séance extraordinaire à 3 heures de l’après-midi, p. 40.

(115) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibération du 20 janvier 1793, p. 39. Ils demandaient même à ce qu’ils ne soient plus reçus « dans aucune société populaire », p. 38.

(116) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 17 mars 1793, séance extraordinaire à dix heures du matin, p. 88.

(117) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibération du 18 janvier 1793, p. 38.

(118) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibération du 21 janvier 1793, p. 42.

(119) ADBR, L 2027 : procès-verbal de délibérations du 5 octobre 1792, p. 66.

(120) ADBR, L 2030 : procès-verbal de délibérations du Comité de révision et d’épuration de la société des antipolitiques républicains d’aix, le 28 pluviôse an II (16 février 1794), p. 17.

(120) Ibid.

(121) ADBR, L 2031 : procès-verbal de délibérations du 11 germinal an II (31 mars 1794), où l’on indique «  que depuis très longtemps, notre commune a donné le grand exemple aux communes voisines de l’établissement du temple de la raison », p. 25 / 128.

(122) ADBR, L 2031 : procès-verbal de délibérations du 8 germinal an II (28 mars 1794), p. 21 / 116.

(123) ADBR, L 2031 : procès-verbal de délibérations du 11 germinal an II (31 mars 1794), p. 25 / 128.

(124) Ibid.

(125) Ibid.

(126) AM Aix, LL 283-3 : Extrait des Registres de Délibérations de la Société des Amis de la Constitution, établie à Aix, Département des Bouches du Rhône, Séance du 1er novembre 1790.

(127) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 31 mars 1793, p. 101.

(128) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations du 28 septembre 1793, p. 126.

(129) ADBR, L 2028 : procès-verbal de délibérations Séance 20 octobre 1793, p.138.

(130) Sur l’adhésion du 1er janvier 1792 à l’adresse de Caen, son nom est inscrit en deuxième, après celui du Président Ferrand, alors qu’il n’est pas même secrétaire, Fond patrimonial de la bibliothèque municipale Méjanes d’Aix en Provence, Aff. 1792, 2 : Adresse des citoyens actifs, connus dans la ville d’Aix, sous le nom des frères anti-politiques, portant adhésion solennelle de leurs frères de Caen, à l’Assemblée nationale (suivie de) Adhésion des Amis de la Constitution de cette ville. Puis ADBR, L 2027 : Procès-verbal de délibérations du 12 février 1792, p. 3.

(131) ADBR, L 2027 : procès-verbal de délibérations du 12 octobre 1792, pp. 69-70. « Député à la Convention Nationale » a été ajouté en marge.

(132) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 17 février 1791, p. 82.

(133) ADBR, L 2026 : Procès-verbal de délibérations du 1er février 1792, p. 175.

(134) ADBR, L 2031 : Procès-verbal de délibérations du 21 germinal an II (10 avril 1794), p. 32 / 142.

(135) ADBR, L 2031 : Procès-verbal de délibérations du 23 floréal an II (12 mai 1794), p. 56-57 / 202-203.

(136) ADBR, L 2027 : procès-verbal de délibérations du 27 septembre 1792, Alors qu’il est indiqué « Séance du 27 7bre 1792. L’an 4ème de la liberté », on a pris soin d’ajouter « & le 1er de l’égalité », p. 58.

(137) ADBR, L 2028, procès-verbal de délibérations du 22 novembre 1793, p. 8. Déjà ADBR, L 2027 : Procès-verbal de délibérations du 3 juin 1792.